Le prix de l’entreprise belge de marketing de l’année sera-t-il décerné à une station balnéaire ? Toerisme Oostende (l’Office du tourisme d’Ostende) est l’un des trois nominés grâce à un projet marketing remarquable, qui plonge ses racines trente ans en arrière. Nous avons demandé à Peter Craeymeersch, directeur général, de nous dévoiler les secrets de cette transformation de la « reine des plages ».
Au milieu des années 1990, Ostende était à la croisée des chemins. La ville faisait face à une infrastructure obsolète, était fortement tributaire du tourisme estival et comptait des hôtels à moitié vides. Près de trois décennies plus tard, Ostende est devenue un lieu de villégiature dynamique et prospère, aux nombreux attraits culturels, que l’on visite avec plaisir pendant toute l’année.
Reconstruire une ville
« La situation en 1995 était moins positive », note Peter Craeymeersch, qui a commencé à travailler à Ostende en 1997. « La ville vivait principalement de ses activités estivales. Une étude a montré que la qualité de nos hôtels était insuffisante et que la ville avait la réputation d’être sale. De plus, nous étions très dépendants de la météo, ce qui rendait notre tourisme vulnérable. » Pour inverser la tendance, la ville a élaboré un plan d’investissement dans les espaces publics. Mais elle s’est bien vite rendu compte que de simples améliorations matérielles ne suffiraient pas. « Nous avons compris qu’il nous fallait un narratif pour soutenir les investissements et créer une image positive », explique-t-il.
Ce qui frappe dans le compte rendu que Peter Craeymeersch fait de cette transformation, c’est son insistance sur la vision économique qui sous-tend le marketing urbain d’Ostende. Par exemple, le plan d’investissement a été porté par un partenariat entre les autorités locales, les hôtels, les restaurants et le secteur privé. Il illustre l’utilité de cette démarche par un exemple concret. « Au début du 21ième siècle, nous avons constaté que les touristes britanniques représentaient 25 % de nos nuitées. Mais ce marché était volatil : il dépendait du taux de change de la livre et de la situation économique. Nous avons donc décidé de nous concentrer sur les touristes belges, allemands, français et néerlandais. Cela a entraîné quelques années difficiles et une restructuration du secteur hôtelier, mais après cette période, nous avions des hôtels capables d’investir, car les prix moyens des chambres étaient plus élevés grâce à la nouvelle orientation du marché. C’est un changement que l’on ne peut mettre en œuvre qu’à partir d’un bon partenariat public-privé et sur lequel on peut ensuite bâtir un marketing cohérent. »
Le comité de sélection qui a retenu le dossier de Toerisme Oostende insiste sur la même idée. « La transformation est le résultat de vingt-cinq années de travail consistant pour améliorer la ville et son attrait touristique, en définissant clairement l’ADN dès le départ », déclare Dirk Vandekerckhove au nom du comité. « Sur cette base, l’Office du tourisme d’Ostende a opéré des choix nets sur le long terme. Il a été le premier en Belgique à proposer une telle vision, fondée sur un partenariat public-privé. C’était vraiment faire preuve de clairvoyance à la fin du siècle dernier. »
Un marketing événementiel de qualité
Le marketing de la ville d’Ostende repose sur une longue liste d’événements uniques et prestigieux qui ont permis à la ville de rayonner. De Théâtre-sur-Mer et Ostende à l’Ancre au Festival du Film en passant par le DS Podcastfestival, FAAR ou encore Ensor2024, l’objectif est toujours d’obtenir un renforcement mutuel entre la ville et l’événement. « Nous misons à fond sur les interactions. Je dis toujours que l’événement doit sortir de l’ordinaire et ne pas être reproduisible ailleurs. » En termes stratégiques, cela signifie que Toerisme Oostende évalue chaque événement en fonction de son rendement économique, de son impact marketing (l’adéquation avec la ville) et de la qualité de l’organisation. « C’est notre indicateur de valeur, et nous constatons que les événements sélectionnés non seulement améliorent l’image de la ville, mais en outre attirent des visiteurs réguliers. » Grâce à une technologie de plus en plus intelligente, Toerisme Oostende analyse également les données et les flux de visiteurs afin d’accroître l’impact de ses événements. « S’il s’avère qu’une rue commerçante ne tire qu’une faible valeur ajoutée d’un événement, nous examinons comment optimiser cela par le biais d’un itinéraire spécial lors d’une édition ultérieure », illustre Peter Craeymeersch.
Arno et le Thermae Palace
L’approche de Toerisme Oostende a manifestement porté ses fruits. Depuis 2007, l’affluence touristique a progressé de 51 %, le nombre d’hôtels quatre étoiles s’est accru et les résidents secondaires ont fortement augmenté. Qui plus est, ces dernières années, la ville a acquis une réputation de haut lieu culturel, où diverses personnalités flamandes ont décidé d’aménager. « À vrai dire, nous avons fait du marketing d’influence avant la lettre », indique Peter Craeymeersch. « Il y a dix ans, des Flamands célèbres comme Marcel Vanthilt et Martin Heylen témoignaient déjà de leur amour pour Ostende. Mais la personnalité qui reflète le mieux la ville, c’est sans aucun doute Arno, même s’il vivait à Bruxelles. Artiste, libre d’esprit, authentique... il représentait pleinement les valeurs d’Ostende. » Toutefois, l’évolution positive de l’image ne doit pas faire oublier qu’Ostende a encore plusieurs défis à relever. La rénovation qui traîne en longueur du Thermae Palace ou les déchets abandonnés sur les plages à cause des nombreux touristes estivaux entraînent une publicité négative. « La chose à absolument éviter dans un tel cas consiste à faire comme si de rien n’était. On ne peut pas rester indifférent quand un jeune de 17 ans se noie, comme cela s’est passé l’été dernier. C’est pourquoi nous menons des campagnes, notamment avec la SNCB, pour faire comprendre que la mer n’est pas une grande piscine tranquille. Il en va de même pour la pollution des plages. »
Au cours des trente dernières années, Toerisme Oostende a toujours gardé à l’esprit une perspective à long terme, et aujourd’hui encore, Peter Craeymeersch n’hésite pas à se projeter dans l’avenir. Il souhaite répondre à l’évolution démographique, avec le vieillissement de la population côtière, et miser sur l’économie bleue. « Ostende peut sensibiliser au changement climatique et favoriser une économie tournée vers l’avenir. Ce qui est formidable, c’est que les gens qui viennent ici ont le temps et prennent le temps de réfléchir à ces questions. »
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